Espoir et désespoir : Une commémoration puissante de la guerre civile libanaise, inaugurée à l’UA | Université Antonine | UA

  • Espoir et désespoir : Une commémoration puissante de la guerre civile libanaise, inaugurée à l’UA

    02 mai 2023

    P. Jalakh : Notre pays est dans un état d’effondrement déplorable en raison de la corruption rampante et de l’absence de reddition des comptes, toutes deux étant des conséquences de la guerre.
    Mortada : Nous devons nous engager dans l’avènement d’une nouvelle ère où la protection mutuelle constitue une priorité afin de construire une nation qui reflète notre véritable valeur.

    Le 15 avril 2023, l’Université Antonine (UA), en collaboration avec le Musée NABU, a inauguré l’exposition intitulée « Espoir et désespoir » en commémoration de la guerre civile libanaise. L’inauguration s’est déroulée en présence du Ministre de la culture, le juge Mohammad Wissam Mortada ; de l’Archevêque maronite de Beyrouth, Son Éminence Mgr Paul (Boulos) Abdel Sater ; du Fondateur du Musée NABU, Dr Jawad Adra ; du Supérieur général de l’Ordre Maronite Antonin, l’Abbé Maroun Abou Jaoudé ; du Recteur de l’UA, P. Michel Jalakh ; d’un groupe de pères antonins ; des doyens, directeurs et chefs de départements de l’UA ; ainsi que de membres de la communauté interne et externe de l’UA.

    P. Jalakh
    Dans son discours, le Recteur de l’UA, P. Jalakh, a déclaré : « Nous nous remémorons cette guerre brutale non pas pour nous infliger de nouvelles souffrances, mais plutôt pour réfléchir à ses images, à sa documentation et à ses tragédies et en tirer des leçons pour l’avenir. ». Il a souligné, dans le même contexte, le rôle prépondérant que les universités libanaises jouent, affirmant que leur mission consiste à fournir des services d’éducation publique et de recherche scientifique approfondie pour servir la vérité dans tous les domaines, en particulier la vérité derrière une guerre qui a coûté la vie à des individus, détruit des villes, défiguré l’histoire, sapé la fraternité entre les citoyens d’un même pays. Cette guerre demeure profondément ancrée dans la conscience de chaque Libanais, car ses répercussions continuent d’impacter à la fois leur vie quotidienne et leur avenir.
    Il estime que les universités libanaises devraient relever ce défi de taille, notamment parce qu’elles accueillent des étudiants venus d’origines, de religions et de confessions différentes. Même si ces étudiants n’ont pas eux-mêmes vécu la guerre et n’en connaissent pas les véritables tenants et secrets, leur famille et leur communauté leur en ont fait des récits, parfois inexacts et contradictoires, mais pouvant contenir une part de vérité.
    Le Recteur souligne également l’importance d’impliquer les étudiants dans ce dialogue essentiel, car les jeunes ont déjà fait l’expérience des avantages de la coexistence avec leurs camarades sur le campus. Dans la mesure où ils bénéficient tous du droit à l’éducation et à la connaissance, ils sont également conscients de la valeur du respect des différences d’opinion et de la liberté de pensée. Ils se retrouvent en particulier sur des questions fondamentales qui affectent leur avenir et constatent les effets persistants de la guerre sur le système de gouvernance de leur pays, qui aura engendré une corruption endémique et un manque de prise de responsabilité, les plongeant, ainsi que leurs familles, dans la ruine, et ce indépendamment de leurs différences.

    Adra
    Pour Dr Adra, il n’est pas nouveau que le sort du Liban ne tienne qu’à un fil, car depuis son indépendance, il a traversé bien des crises et des guerres. Selon lui, le problème majeur réside dans la nature du système que nous avons accepté par choix, par contrainte, par impuissance ou par une combinaison de tous ces facteurs ; un tel système politique, social et économique génère des crises sans solutions.
    Ainsi, il considère que le déclenchement de la guerre en 1975 n’a pas été causé par l’ « implantation des Palestiniens », la « peur de leur armement » ou la « trahison » des intérêts d’Israël. De même, la situation actuelle n’est pas un conflit entre les alliances du « 14 mars » et du « 8 mars » ni entre les slogans « liberté, souveraineté et indépendance » et « les armes de la Résistance ». La racine du problème réside plutôt dans le système corrompu pour qui nous ne sommes que des pions. Dr Adra a ajouté que les prétendus « chefs religieux » ou leurs « leaders militaires », leurs partisans et les citoyens de manière plus générale, sont à la fois victimes et acteurs du cercle vicieux de la violence. La seule façon d’en sortir est d’abord d’identifier le problème, puis de développer des solutions par la vérité et la réconciliation.
    Il a conclu son discours en soulignant qu’il est temps que nous réalisions que tout le monde est perdant à la fin. Et a, enfin, exprimé l’espoir qu’Information International et le Musée NABU contribueront à raviver la mémoire du peuple libanais à travers le livre « Lebanon’s Wars, Why ? » et l’exposition « Espoir et désespoir » afin que les erreurs du passé jamais ne se reproduisent.

    Mortada
    Dans son discours, le Ministre de la culture a souligné que le Liban ne peut être le monopole d’un seul groupe, car son essence réside dans sa diversité. Il incombe donc à chaque groupe de protéger et de soutenir les autres, dans le souci commun d’assurer la survie de la nation.
    Il a insisté sur l’importance d’embrasser la diversité et de respecter les différentes croyances et les valeurs sacrées de tous pour construire une nation plus forte et plus unie. Il a également exhorté le peuple libanais à œuvrer en faveur d’une nouvelle ère de coexistence où tous pourront célébrer leurs différences et travailler ensemble à la construction d’un avenir meilleur.
    Il a poursuivi : « La guerre n’est pas un événement isolé, mais plutôt un discours armé qui attaque la société avec des munitions verbales, morales et psychologiques, créant des barrières entre les gens, semant la peur entre et au sein de chaque groupe, brisant entre eux les possibilités de coexistence, de sorte que les conflits militaires et les barricades entre les quartiers deviennent inévitables ».

    Wehbé
    Le journaliste Yazbek Wehbé est intervenu pour mettre en lumière les causes, les circonstances et les conséquences de la guerre civile, et ce, malgré les divergences de points de vue entre les factions politiques. Il s’est demandé si le peuple libanais avait bien mesuré l’ampleur des catastrophes humanitaires causées par la guerre et les leçons que l’on pouvait en tirer.

    À la clôture de l’événement, l’UA a présenté une édition rare de la première Bible arabe imprimée à Rome en 1590, et réimprimée par les moines antonins.
    L’ouverture de l’exposition « Espoir et désespoir » à l’UA marque une étape importante dans l’engagement de l’Université à promouvoir les arts et à favoriser les échanges culturels. Elle rappelle avec force l’importance de l’art comme moyen de comprendre et de réfléchir au vécu commun, ainsi que de trouver l’espoir et l’inspiration face à l’adversité.

    L’exposition « Espoir et désespoir » est ouverte au public jusqu’au 12 mai, entre 11 h 00 et 17 h 00, sur le Campus de Hadat–Baabda de l’UA. Des séminaires et des conférences pour les étudiants, axés sur la guerre et ses conséquences, accompagnent également l’exposition.